Exemple d'explication de texte : Voltaire.

Publié le par Mme Lucas

Vous trouverez ci-dessous un exemple de rédaction de l'explication du texte de Voltaire, que vous avez travaillé. Seul le début est rédigé, pour vous montrer comment le détail et les définitions doivent être votre souci constant.

Entre crochet, des éléments de méthode, ou des remarques de comprhénsions supplémentaires, que vous ne pouviez connaître mais qui sont intéressantes.

Le texte :

Nous avons la belle fable de Crantor1; il fait comparaître aux jeux olympiques la Richesse, la Volupté, la Santé, la Vertu; chacune demande la pomme. La Richesse dit: « C’est moi qui suis le souverain bien, car avec moi on achète tous les biens ». La Volupté dit: « La pomme m’appartient, car on ne demande la richesse que pour m’avoir ». La Santé assure que sans elle il n’y a point de volupté, et que la richesse est inutile ». Enfin la Vertu représente qu’elle est au-dessus des trois autres, parce qu’avec de l’or, des plaisirs et de la santé, on peut se rendre très misérable si on se conduit mal. La Vertu eut la pomme.

La fable est très ingénieuse […] mais cette fable ne résout ni ne peut résoudre la question absurde du souverain bien. La vertu n’est pas un bien, c’est un devoir: elle est d’un genre différent, d’un ordre supérieur. Elle n’a rien à voir aux sensations douloureuses ou agréables. Un homme vertueux avec la pierre et la goutte2, sans appui, sans amis, privé du nécessaire, persécuté, enchaîné par un tyran voluptueux qui se porte bien, est très malheureux ; et le persécuteur insolent qui caresse une nouvelle maîtresse sur son lit de pourpre est très heureux. Dites que le sage persécuté est préférable à son indigne persécuteur; dites que vous aimez l’un, et que vous détestez l’autre ; mais avouez que le sage dans les fers enrage. Si le sage n’en convient pas, il vous trompe, c’est un charlatan.

Voltaire Dictionnaire philosophique Article « Souverain bien »

L'explication

[Introduction du texte]

Dans son article de l'Encyclopédie sur le « Souverain Bien », Voltaire se démarque de la vision traditionnelle du bonheur [thème] présentée habituellement par la philosophie, et il qualifie même de charlatant celui qui la défendrai encore [cf. l.14]. [Il s'oppose ici à la philosophie grecque en particulier, pour qui le bonheur se trouve en cherchant sans cesse le bien].

[Problème] D'une part il semble qu'une vie sans vertu, qui ne chercherait pas à faire le bien, ne pourrait être heureuse ; d'autre part, il apparaît que faire le bien peut nous mener au malheur. [Problématique] Suffit-il d'être vertueux pour trouver la clef du bonheur, ou au contraire la vertu n'exige-t-elle pas d'etre capable de renoncer à son propre bonheur ?

Il cherche à montrer que [thèse] s'il faut s'efforcer d'être vertueux, ce n'est cependant pas dans la vertu que se trouve le bonheur. Le bonheur est bien plutôt présenté comme résidant la satisfaction des désirs et l'absence de troubles du corps et de l'âme.

Nous verrons ainsi que dans une première partie, Voltaire présente la thèse traditionnelle identifiant le bonheur à la vertu (l. 1-6), pour la contester ensuite en montrant que la vertu n'a rien à voir avec le bonheur (l. 7-12).

*

[Annonce de l'idée de la première partie, reliée à la thèse] Tout d'abord, Voltaire commence par présenter la thèse qu'il contredira ensuite, qui identifie le bonheur à la vertu. [Reformulation de l'idée du 1er §]

Pour ce faire, il présente une fable de Crantor, philosophe grec platonicien, qui vise à déterminer quelle est la clef du bonheur. Aux « jeux olympiques », nous dit-on ligne 1, comparaissent quatre candidats, « la Richesse, la Volupté, la Santé, la vertu ; chacune demande la pomme » (l. 1-2). Le cadre est planté : on se demande lequel de ces quatre candidats peut avec le plus de légitimité prétendre être la clef du bonheur. Nous pouvons noter que les quatre candidats représentent tout ce que l'homme peut désirer. La question qui se pose alors est celle d'une hiérarchisation : lequel de ces candidats est vraiment essentiel au bonheur, et non seulement accidentel ? C'est une pomme qui va les départager, qui représente le bonheur. Il est intéressant de noter qu'il n'y a qu'une seule pomme. L'idée n'est donc pas ici de dire que toutes concourent au bonheur, mais bien d'en identifier une seule qui soit la cause du bonheur de l'homme. Le symbole de la pomme n'est pas anodin pour un Grec : il rappelle le concours de beauté où Pâris dû choisir la plus belle des déesses qui lui étaient présentées, en remettant une pomme d'or à celle qu'il avait choisi. La pomme de beauté devint ainsi pomme de discorde. Ici, il ne s'agit pas de discerner la beauté, mais le garantie de bonheur que chaque candidat peut avancer. La discorde naît ici du fait qu'il n'y ait qu'une pomme pour quatre : celle qui la recevra disqualifiera les autres de la prétention à mener au bonheur. C'est du moins ce que Crantor va proposer comme thèse.

Cette fable est dite « belle » (l. 1) dans la mesure où elle propose une vision agréable de l'existence – mais déjà nous pouvons entendre l'ironie de Voltaire. Cette fable est certes belle, mais elle n'est bonne que pour les enfants, qui ont assez de crédulité pour croire que seule l'homme bon sera heureux, et que les méchants seront nécessairement malheureux – nous reverrons cela plus tard.

[Annoncer de l'idée du 2e §] Voltaire présente d'abord, dans la bouche de Crantor, les deux premiers candidats au bonheur, qui tout deux font du bonheur la jouissance des biens matériels. Le premier candidat est en effet la richesse, qui affirme être « le souverain bien ». L'expression de souverain bien peut paraître étonnante. [Définition des mots clefs du passage cité] Ce qui est souverain, c'est ce qui détient pouvoir de gouverner une communauté. Ici, nous pouvons le comprendre comme ce qui gouverne tous les hommes. Ce qui est dit souverain est le « bien », le bien désignant au sens large tout ce qui m'est profitable. L'expression veut ainsi dire le bonheur, dans la mesure où c'est la chose la plus profitable qui puisse nous arriver, et qui gouverne en quelque sorte toutes nos actions. La richesse peut prétendre être le bonheur dans la mesure où avec elle « on achète tous les biens » (l. 2-3). [Définition des mots clefs du passage cité] La richesse peut se définir comme la possession suffisante des biens matériels nécessaires à assouvir tous nos désirs. [Interprétation]Ainsi elle apparaît être le moyen utile pour être heureux, en tant que la richesse peut se transformer virtuellement en toute autre chose. Celui qui possède Richesse peut ainsi combler tous ses désirs. [exemple] L'identification du bonheur à l'argent peut se voir par exemple dans nos sociétés contemporaines, où celui dont on dit qu'il « réussi sa vie » est celui qui est parvenu à devenir riche – comme s'il suffisait d'amasser des biens matériels pour être heureux et réussir sa vie. [Amorce d'une critique de ce passage] La conception du bonheur qui st présenté par ce premier candidat est que le bonheur se trouve uniquement dans la satisfaction de nos besoins matériels. Le principal problème est que nos besoins matériels ne semblent jamais réellement satisfait. Si celui qui est riche peut assouvir tous ses désirs dans le sens où il en a les moyens, il ne pourra néanmoins les assouvir dans la mesure où ses désirs sont en réalité infinis. C'est ce que l'on pourrait appeler le cercle infini des désirs. Celui qui ne possède pas quelque chose le désire, et lorsqu'il le possède, il ne le désire plus puisqu'il le possède. Donc il désire à nouveau autre chose. Au fond, que l'on possède ou non Richesse, le problème reste le même : nous ne parvenons pas à être heureux dans la satisfaction de nos désirs. Le deuxième problème est que Richesse se présente comme le moyen pour obtenir tous les biens. Or elle ne permet en réalité que d'obtenir des biens matériels. Les biens les plus essentielles, comme l'amitié par exemple, lui échappent, car justement ils ne s'achètent pas. La richesse ne permet donc pas d'obtenir le bonheur. Pour ces raisons, la Volupté prétend prendre la pomme, car « on ne demande la richesse que pour m'avoir » (l. 3). [Définition des mots clefs du passage cité]La volupté désigne la sensualité ou les plaisirs du corps ou de l'esprit. [Interprétation]La volupté prétend être clef du bonheur, en tant qu'elle serait la fin que tout le monde cherche, alors que la richesse n'est qu'un moyen pour l'obtenir, le moyen étant ce que l'on cherche en vue d'autre chose, et peut-être même un moyen parmi d'autres – tous les plaisirs ne s'achetant pas. La richesse serait donc importante, mais seulement en vue des plaisirs que procure le plaisir. Volupté cherche à monter que la soif de l'homme pour la richesse ne dit pas que le bonheur réside dans cette richesse, mais seulement que la richesse est nécessaire pour l'obtention du bonheur que serait la volupté. La conception du bonheur que présente ce candidat est qu'au fond le bonheur s'identifie à cet état de satisfaction qui suit la satisfaction de nos désirs. [Amorce d'une critique de ce passage] Mais nous pouvons appliquer à la volupté la même critique qu'à la Richesse : la volupté n'est en réalité que de courte durée, car lorsque je possède ce que je désirai, le désir qui implique le manque cesse, et je m'ennuie alors de ce que je possède. La volupté est bien liée à la quête du bonheur, mais elle ne serait en être la clef, dans la mesure où elle ne parvient pas à combler véritablement le coeur de l'homme. On peut également dire que la volupté n'est pas réellement la finalité de notre existence, mais n'est que la conséquence de l'état de bonheur de bonheur. Celui qui est heureux est habité par une sorte de plaisir qui l'englobe, mais cela ne signifie pas que le bonheur s'identifie à ce plaisir [c'est l'idée d'Aristote : le plaisir n'est pas LA finalité de notre vie, mais une finalité par surcroît]. La pomme du bonheur est ainsi retirée à la Volupté. Puisque les biens matériels ne permettent pas de nous rendre heureux, il faut le chercher dans d'autres candidats, moins attrayant de prime abord.

[Annoncer de l'idée du 3e §] Le bonheur semble donc ne pas résider dans l'assouvissement de nos désirs. Il serait donc à trouver dans l'homme lui-même, tantôt dans l'apaisement de son corps, tantôt dans la bonté de ses actes.

Publié dans objectif bac, Le bonheur

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